Chat Control et messages privés : décryptage des enjeux et garde-fous européens
La proposition, officiellement nommée CSAM (Child Sexual Abuse Material), viserait à obliger les services de messagerie tels que WhatsApp, Signal ou Messenger à détecter les contenus pédocriminels. Le mécanisme envisagé prévoit un scan côté client : analyse des images, vidéos ou liens directement sur l’appareil de l’utilisateur, avant que le message ne soit chiffré et envoyé.
Application du contrôle des contenus
Face aux critiques, la version actuelle du texte prévoit des garde-fous. Le scan serait limité aux contenus visuels et aux URL, et ne concernerait pas, pour l’instant, les textes ni les messages audio. Pour les messageries chiffrées, l’activation du scan nécessiterait le consentement explicite de l’utilisateur. En cas de refus, l’envoi d’images et de vidéos serait bloqué sur le service concerné. Enfin, tout signalement serait vérifié par un humain au sein d’un futur Centre de l’UE avant d’être transmis aux autorités.
Inquiétudes et avis des chercheurs
De nombreuses voix appellent à la prudence : une lettre ouverte signée par plus de 700 experts mondiaux, parmi lesquels des chercheurs de l’EPFL, juge cette technologie « inefficace » et facile à contourner, et estime qu’elle pourrait « affaiblir la sécurité de tout le monde » en créant une porte dérobée dans le chiffrement.
Enjeux juridiques et droits fondamentaux
Au-delà des aspects techniques, des spécialistes soulignent un point juridique crucial. Ils évoquent un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (Podchasov c. Russie) qui rappelle que le stockage de données relatives à la vie privée constitue déjà une ingérence. Le scan préventif irait donc, selon eux, à l’encontre de ce droit fondamental.
Bien que la Suisse ne soit pas directement visée par le texte, des entreprises helvétiques comme Proton et Threema se disent préoccupées et ont évoqué la possibilité de se retirer du marché européen. L’issue du dossier dépendra du vote des États membres au Conseil de l’UE, prévu le 14 octobre.